ZEVS, chef des dieux du street-art, frappe de sa foudre le monde de l’Art. Son nom emprunte le rôle du chef des dieux du panthéon grec, mais ses actes donnent-ils dans la mythologie ? Non, ils relèvent de la légende.
L’enlèvement d’une icône, pub de marque de café italienne dans la capitale allemande avec remise d’une rançon-intox au Palais de Tokyo restera sa tête de gondole. Il a tellement d’éclairs de génie dans le carquois de son nuage. Les non-dits de l’homme s’illustrent dans ses travaux. Tout est si simple. Il suffit de voir son logo, 4 éclairs pour 4 lettres noires et un triangle fond jaune de Danger Electricité, pour s’initier. En domestiquant la lumière, il fabrique de l’optique. Non plus électron, mais photon libre.
Et la lumière fuse
Ses artifices relevant du lux (NDR : unité de mesure de l’éclairement lumineux) sont pertinents. Plus artisan que conquérant de la lumière, il a la capacité d’éteindre une rue en disjonctant les interrupteurs des lampes en l’air. Les citadins sont surpris par ses flashages, qui matérialisent les ombres nocturnes électriques de mobiliers-urbains et de Sans.Dividendes.Fixes. Il occulte le spectre des couloirs du métropolitain en remplaçant les néons par ses home-products d’éclairs de goudrons scratchés. Le scratch est aussi un mouvement quand il mixe d’identiques colonnes lumineuses lors d’une performance à la Galerie du Jour. Performer en essence, il débarque lors de son vernissage à la galerie Patricia Dorfmann, un dazzer (NDR : poing électrique de défense. Environ 100 000 volts) à la main électrifiant tour à tour objets métalliques et sa propre bouche. Maîtrise totale du processus optique, il prend les couleurs du spectre lumineux pour en faire des coulures d’arc-en-ciel sur la FNAC Montparnasse.
Sa démarche optique a pris un aspect quintessencié lors d’une balade en bateau-mouche au printemps dernier, en s’appropriant la réflexion lumineuse.
Flash.back
Invité et en bonne compagnie, me voilà sur le frais ponton d’une péniche loin du radeau de la méduse compte tenu de la jolie faune vêtue de fourrures, de costards ou de barbes bien mal rasées. Autour du breuvage champenois, chacun se demande vers quoi vogue la galère. De solides projecteurs de cinéma embarqués et habillés de gélatine commencent à transformer les quais de Seine, en scène, plantant le décor d’une ambiance Ultra-violette. Les convives attendent. Au pied de Notre-Dame, il apparaît braquant son objectif vidéo sur le public excité, émerveillé, et satisfait. Le “violet”, couleur ésotérique de l’initiation, éclaire le quai. Une phrase écrite en encre phosphorescente apparaît et disparaît. L’invisible ne sera visible que quelques secondes, le temps qu’une coque fasse des vagues (cf. page ci-contre). Son aspect manipulateur est plaisant car sans public pas d’œuvre. L’utilisation d’une encre sympathique uniquement lisible au bon vouloir de l’artiste l’assoit comme un chef d’orchestre. Ses musiciens n’ont d’instruments que de l’impalpable, sa partition le rend matière éphémère et éternelle.
Plus fort qu’un écrit qui ne s’envole pas. Personne ne pourra le voir de nouveau. “Le vrai style est invisible.”
www.patriciadorfmann.com
www.thestudio55.com
Texte : Jérôme Demuth
Photographie : Jérôme Demuth
EXTRAIT DEDICATE 15 – Hiver 2008