Nous avons rencontré Asa Taccone et Matthew Compton pour un petit déjeuner à l’Hôtel Particulier de Montmartre, le jour de la sortie de leur nouvel album – Plural. Nous discutons inspirations et, aussi, pourquoi avoir attendu si longtemps pour faire leur second album.
Sur votre chaîne YT, nous pouvons voir la vidéo du concert chez Lois the Pie Queen. Pouvez-vous nous en dire un peu plus ?
Asa : Lois the Pie Queen est un restaurant soul food d’Oakland. Quand j’avais 15 ans, je me suis mis à travailler là-bas, j’étais le seul mec blanc. Il y avait beaucoup de rappeurs et beaucoup d’artistes du hip-hop qui y venaient. Le propriétaire m’a pris sous son aile et j’y ai travaillé pendant des années. J’ai appris comment dealer avec les gens. Et quand nous tournions pour Google, il y avait l’idée de revenir à mon premier lieu de travail, alors nous l’avons fait, c’était comme de rentrer à la maison. Raphael Saadiq, un producteur très célèbre, aime Lois the Pie Queen, il nous a contacté après notre concert là-bas.
Et quel serait un lieu sentimental pour vous Matthew ?
Et bien, la ville où j’ai grandi était très petite et il n’y avait vraiment pas beaucoup de choses à faire là-bas, c’est pourquoi j’en suis parti d’ailleurs (rires). Mais il y a un club à DC qui s’appelle le Black Cat, beaucoup de groupes punk de DC y ont commencé et j’adore toujours y aller. Nous y avons même joué.
Où avez-vous grandi et quel genre de musique écoutiez-vous jeunes et adolescents ?
Asa : Je viens de Berkeley en Californie, mes parents sont des ex-hippies, ils sont aussi très politisés. En grandissant, j’écoutais beaucoup de folk et tous les classiques. Mais une fois au lycée, tout le monde écoutait du hip hop, je m’y suis mis, 2pac et beaucoup de West Coast rap. Je pense que ces deux univers jouent un rôle important dans la façon dont nous jouons.
Matthew : Fugazi était vraiment important pour moi. Le batteur de ce groupe m’a vraiment formé. Les lives étaient incroyables, ils sont super punk, super cool. Ils m’ont vraiment influencé.
Vous avez tous deux déménagé à Los Angeles, comment vous êtes-vous rencontrés ?
Asa : Je vivais dans une grande maison à Los Angeles, une maison de musicien avec un studio au sous-sol. En venant d’une culture hip hop, c’était fascinant pour moi de découvrir de nouveaux sons. J’ai rencontré Matthew là-bas. Nous avons commencé à enregistrer des chansons ensemble. Au moment où le disque a été terminé, nous n’avions aucune intention d’être un groupe. À un moment Danger Mouse a suggéré que nous devrions lancer l’album. C’est ainsi que notre premier album a été réalisé sans aucune pression.
Pourquoi Electric Guest ? Quelle est l’histoire derrière le nom ?
Asa : Ado, j’ai fait quelques bétises et mes parents m’ont envoyé dans un Boot camp. Le seul endroit où traîner était un Donut Place. Il y avait une vieille femme qui travaillait là-bas, elle était assez mystique et métaphysique. Nous avions quelques conversations. La dernière fois que je l’ai vue, elle m’a dit “always remember that you are an electric guest of the universe “. J’ai raconté cette histoire à Danger Mouse, il a dit que ce devrait être un nom pour le groupe.
Qu’est-ce qui vous inspire à créer de la musique ?
Matthew : Surtout pas la musique. Les films m’inspirent beaucoup.
Asa : Pour moi c’est de la musique, la musique sans paroles. Parfois, je ne peux pas écouter de musique pendant des mois. Je me tourne alors vers les arts visuels. Mon oncle qui est un peintre abstrait était censé nous faire une couverture pour Plural. Il s’appelle Jerry Carniglia, malheureusement, il est décédé. Nous avons joué à son enterrement. C’était une expérience très forte et inspirante. Il vivait dans une ancienne usine de néons, remplie de son art et de ses carnets. Ses funérailles n’étaient vraiment pas conventionnelles.
Qui écrit les paroles ? Et quel est votre processus de création ? Court et facile ou plutot difficile et long?
Asa : Certainement le deuxième (rires) J’écris la mélodie et je chante quelque chose dessus, mais j’essaie de le faire à l’intuition, de poser les mots sur la mélodie. J’aime les paroles des Beatles, ils ont de superbes paroles, rien de trop arty, accessibles à tous. Pour Plural, je voulais éviter les paroles prétentieuses – pas que le premier album le soit, mais comme les temps changent, je voulais écrire quelque chose de plus sensible.
Quelle partie de la vie de musicien préférez-vous, tourner ou enregistrer ?
Asa & Matthew : Enregistrer !! En mode chambre et pyjama.
Matthew : Je pense qu’il est bon de tourner, ça vous sort de votre élément. Ça me réinspire et me rajeunit. Je pense que si je restais trop enfermé dans ma tête ou si je restais trop longtemps en studio, je deviendrais fou. Vous devez partager ce que vous produisez. Vous pouvez travailler sur une chanson indéfiniment et vous pouvez même penser que c’est génial, puis vous la jouez à quelqu’un et dans les deux secondes, vous savez si ça fonctionne ou pas.
Avez-vous travaillé avec Danger Mouse pour votre deuxième album ?
Asa : Cette fois, il était plus producteur exécutif, donc il appelait, on allait chez lui, il écoutait les chansons et il disait simplement “c’est bon”, “ça ne marche pas”. C’était une méthode différente de celle de Mondo.
Nous vous rencontrons le jour de la sortie de votre nouvel album Plural, comment vous sentez-vous ?
Matthew : Excité !
Asa : J’étais nerveux, je n’ai pas beaucoup dormi hier soir. Vous ne savez rien tant que vous ne l’avez pas donné à quelqu’un. Vous avez quelque chose et, tout à coup, ce n’est plus à vous, il appartient au monde.
Pourquoi 5 ans ?
Matthew : Nous avons enregistré un album et notre label pensait que nous devions continuer à écrire. C’était un album plus sombre et plus lent et en fait c’était très bien qu’ils nous poussent à ne pas nous arrêter là. Dès que nous avons eu Dear to me, nous savions que nous allions dans la bonne direction. Donc, oui, c’est l’une des raisons pour lesquelles il nous a fallu 5 ans.
Connaissez-vous le groupe Prefab Sprout des années 80 ?
Asa et Matthew : Nous ne connaissons pas ce groupe, mais l’influence des 80’s est bien là.
On peut entendre des instruments des années 70 dans Dear to me…
Asa : Oui, on s’est enfermés chez deux de nos amis, des mecs assez riches avec des instruments incroyables. Ils ont ce studio avec des synthétiseurs fantastiques, nous y allions la nuit pour enregistrer.
Dans la vidéo (Dear To Me), on a ce happy feeling de la côte ouest, c’est comment de vivre à Los Angeles ?
Asa : Oui, c’est super cliché, on était sûrs de ne pas se rater. Sinon, je me reveille, je vais surfer, il y a beaucoup de soleil, j’adore. Dans la vidéo, nous avons essayé de capturer ça, nous avons demandé aux amis, ma mère, ma soeur y sont également, pas d’acteurs, que nos amis ! Il y a aussi le séquence pendant le mémorial de mon oncle, celui dont je vous ai déjà parlé, la photo avec la bougie.
Une chanson qui vous obséde en ce moment ?
Matthew : Ma chanson préférée de tous les temps est de John Barry, The more things change, en particulier la version instrumentale.
Si vous ne deviez garder qu’un disque ? Ou 3, si c’est trop dur…
Asa : J’en choisirais un pour chaque humeur. Récemment, j’écoutais beaucoup les Talking Heads.
Matthew: Je choisirais Fugazi, In on the Kill Taker, et Blonde Redhead, Melody of Certain Damaged.
Que pouvons-nous vous souhaiter ?
Asa & Matthew : Notre album vient de sortir, souhaitez nous bonne chance! Et souhaitez aussi bonne chance à l’Amérique, elle en a besoin depuis quelques mois…
Interview & Photographie MAGDALENA LAWNICZAK
Remerciements à l’Hôtel Particulier Montmartre
Archives DEDICATE 35, Printemps/Eté 2017