“II ”. Il ne fallait pas moins d’un chiffre romain pour signer le retour des pontes de l’electronica berlinoise. Fusion de la matière brute de Modeselektor avec l’acoustique et les vocaux fragiles et aériens d’Apparat, Moderat revient sur le devant de la scène avec un album composé à 6 mains, signé sur leur label Monkeytown. Reportée suite à l’accident d’Apparat, leur tournée s’annonce déjà comme la messe électronique, sonore et visuelle de ce début d’année 2014. Et ce n’est pas Modeselektor, rencontré dans leur fief berlinois, qui oserait nous contredire…
Quand et comment vous êtes-vous rencontrés ?
Modeselektor : Nous avons rencontré Sascha (Apparat, ndlr) pour la première fois en 2000. C’était au WMF, un club légendaire de Berlin. Nos styles musicaux respectifs n’avaient absolument rien à voir – ce qui était plutôt intéressant ! – Sascha produisait une musique calme et fragile alors que nous jouions un dancehall hardcore inspiré de la techno… Comme aujourd’hui en fait. (Rires)
Comment pourriez-vous définir votre alchimie artistique ?
Je pense que le fait que nos musiques soient si différentes, voire opposées, rend notre collaboration encore plus excitante. Nous sommes réellement différents mais quelque part – à travers Moderat – on se retrouve. Nous partageons tous à la base une même vision de la musique électronique : nous ne voyons pas celle-ci comme un mode de vie mais comme une réelle passion.
Votre trio démontre bien que les opposés s’attirent , mais vos musiques fusionnent-elles aussi bien?
En effet, nos musiques contrastent énormément l’une avec l’autre. Cela explique sûrement pourquoi leur mélange fonctionne si bien ! Il n’y a rien de pire que d’avoir le même avis sur tout et de ne jamais discuter ou débattre de ses idées…. Et des débats, je peux vous dire qu’il y en a eu pour faire aboutir cet album !
Votre premier album en commun date de 2011, avez -vous pensé “ II” comme une suite ou une nouvelle aventure ?
On fait de la musique avec nos tripes. C’est toujours une aventure assez incroyable. “II” n’a pas été pensé comme une suite. Cela n’a pas été facile mais pour créer, nous nous sommes vraiment déconnectés de tout… Sans le savoir, nous avons peut-être expérimenté une nouvelle forme de thérapie de groupe ! (rires)
Entre ces deux albums, qu’est-ce qui a changé dans votre façon de travailler ?
La première différence est que nous avons enregistré le premier album dans le studio de Sascha alors que “II” a été enregistré dans notre propre studio. Ensuite, nos attentes n’étaient pas les mêmes : nous n’avons pas cherché à faire fusionner nos propres styles mais plutôt juste faire de la musique ensemble. “II” c’est la rencontre de trois amis décidés à créer leur propre musique. À mon avis, toute la différence avec le premier album est là.
Avez-vous réussi plus facilement à trouver une direction à cet album ?
Jusqu’à présent, il n’a jamais été évident de trouver une ligne directrice à nos productions. C’est encore plus compliqué quand on bosse sur un album entier. C’est venu un peu comme par magie. Jusqu’au dernier moment, nous n’avions aucune idée du résultat de l’ensemble de nos productions réunies.
Il n’y a pas d’invités sur ce dernier album, est-ce une volonté de votre part ?
Plus qu’une intention, je dirais que cela nous a semblé logique. Nous voulions enregistrer un album en tant que groupe et non juste inviter des guests pour collaborer. Il faut dire qu’avec Modeselektor nous avons déjà collectionné les collaborations…
Comment se répartiront vos rôles sur scène ?
En fait, on est comme un groupe de musique classique : chacun joue de son instrument ! Sascha chante, joue du clavier et de la guitare. Sebastian Szary s’occupe de la partie digitale et gère une multitude d’effets rien qu’avec les machines, sans ordinateur. J’y (Gernot Bronsert, ndlr) ajoute les beats, basslines etc…
Toute la partie visuelle de votre live est signée par vos fidèles acolytes de Pfadfinderei . Comment travaillez -vous ensemble ?
Cela fait maintenant 15 ans que nous travaillons ensemble… Il fut même un temps où nous vivions ensemble ! Autant dire qu’on se connaît vraiment par coeur. Ils sont un peu notre “pendant” graphique et visuel, c’est pourquoi nous leur laissons une totale carte blanche.
Idem pour Siriusmo, qui est un artiste de votre label, également à l’origine de votre pochette ?
Oui, Moritz (Siriusmo) n’est pas seulement un artiste de génie, c’est aussi un peintre de talent. Il est arrivé avec une idée pour la nouvelle pochette et on a tout de suite adhéré.
La tournée est reportée au début de l’année prochaine, êtes-vous impatients de présenter enfin cet album en live ?
Nous reprendrons des chansons du premier album mais nous avons imaginé un show totalement nouveau, avec quelques surprises. Vivement 2014…
Interview Pauline Lévignat
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